Le chien et l’aveugle

Les clients du bistrot noyés dans la fumée
Gris, sales, débraillés
L’aveugle debout, son pastis et sa canne à côté
Le chien collé à ses pieds.
Dehors une pluie fine
Martèle la route et les voitures en sourdine.
De temps en temps la pauvre bête
Esquisse un mouvement pour redresser la tête ;
Mais c’est la canne qui s’abat
Pendant qu’une voix rauque lui crie « bouge pas ! »

Quand les hommes auront fini d’exterminer les bébés
phoques, les baleineaux,
De rouler dans le pétrole les oiseaux,
Quand ils auront par référendum décidé
D’anéantir les boxers, les fox-terriers et les bassets
Je descendrai dans la rue
Et à tous les homo-sapiens, je montrerai mon cul !

Un jour qu’une pluie fine
Martèlera la route et les voitures en sourdine.